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Texte Libre

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15 février 2009 7 15 /02 /février /2009 14:15


Avant guerre, les croissants de l'épicerie Briochin étaient réputés dans toute la ville.
Ce n'était pas Auguste, le patron qui les fabriquait, non. Chaque matin à six heures, le commis de la pâtisserie du boulevard venait lui en apporter une pleine corbeille, fumante et odorante. Le mitron était accueilli par le matou de la maison qui venait amicalement se frotter à ses jambes.
Bonjour, Auguste. Cinq douzaines, comme d'habitude!

Invariablement, le fumet des croissants envahissant la rue faisait se lever, voire se découtir les gens qui mettaient aussitôt le café à chauffer et couraient chez Auguste, une pièce à la main.
Pendant une heure, la boutique était emplie de clients. C'est quand même ici que l'on trouve les meilleurs croissants! Glissait madame Branchu à l'oreille de sa voisine.
Ici et chez le pâtissier Tonin qui les fabrique, tout de même! Répliquait l'autre.
Je ne sais pas comment ça se fait, ce sont les même mais je trouve qu'ici ils sont meilleurs! Et au moins ils sont toujours bien chauds. Je me demande comment Auguste s'arrange pour que ses croissants aient toujours l'air de sortir du four! Vous le savez, le croissant est une denrée éminemment périssable. Chaud, il est délicieux, tiède il est quelconque, froid il devient insipide et indigeste. Et pourtant, le commerçant qui a sur les bras des croissants de la veille est bien obligé de les vendre.
Il se garde bien de les servir à un client attitré, les réservant pour l'inconnu qui passe. Il y en a qui les repassent au four, aujourd'hui c'est aisé et très efficace mais alors c'est bien compliqué et Auguste ne s'y serait pas essayé. Il avait sans le vouloir trouver un moyen beaucoup plus astucieux.

Et voici comment le manège a été découvert. Je vous ai dit que chaque matin le commissionnaire pâtissier était accueilli par le gros chat de la maison, lequel s'appelait, inexplicablement Médor!
Ce jour là, Médor le chat n'était pas accouru au devant du garçon. Fort étonné de son absence, il était en train de l'imaginer malade ou même mort lorsque l'épicier apparut sur la porte. Son regard dibeubiyou fit le tour de la boutique et se posa sur la corbeille ou il disposait ses croissants.
Le chat sans doute fatigué par une partie de chasse, dormait profondément sur le doux matelas des croissants de la veille. Il s'était oublié dans son somme, l'animal!
Et son maître agromandeu eut beau faire: fute! fute! Et invectiver ce bandit de Médor, le petit mitron ne fut pas dupe. Il avait comprit que le matou avait dans la corbeille sa couche habituelle dont il payait le loyer en tenant en permanence les croissants au chaud! Un peu aplatis mais à 40°, température ordinaire des chats bien portants!
Comme vous le pensez, le petit pâtissier ne tint pas le secret des croissants chauds de l'épicerie Briochin. C'est ainsi que nous pouvons vous la raconter sans risques: il y a prescription!


                                
Goulichà : lu croissan tsao.

Avan guiarà, lu croissan de l'épicerio Briochin éron riputo dïin touta la vièlà. Couéra pè lou Gustou, lou patrou (ganè), k'ou fabrikèvon, non. Tsèc mati a séi ouri, lou comi de la patisserio dao boulevar veniao lïe in pourta saï én ple paya, fuman, é odouran .
Lou mitrou éra akeuyi par lou matou de la maézou ke veniao amicalamin se frota a si tsambè .
Boudzour, Gustou. Chin doudzènè, couma de coutiumà!
Pè variablamin, lou fumè de lu croissan invahissan la tsarèrà faziao se louva, vere se dicoutir lou monde ke betèvon teucheto lou café a tsaofè é courion tsè lou Gustou , na pièssà a la mo .
Pindin younà ourà, la bouticà éra implidà de pratiki.
Couéi can méme atïe ke trèpon lou mèyuri croissan ! Icalèvao madama Branchu a l'eurèyà de sa vejina . Atïe é tsé lou patissaïre ( patissié ) , lou Tonin cao ou fabriqua, tou de même ! Riplikèvao l'aotra .
Sèbe pè coji co se fa, mé trèpe k'atïe son méyuri. É eu muin, son toudzour bian tsao. Ieu me demande coji (couma) l'Auguste s'arandza par ke su croissan ayon toudzour l'ar de sortir dao four!
Ou sèbié, lou croissan i na dinradà éminamin périssablà. Tsao i déliciou, tiède i kèlconke, fri devin inchipide é pè dijèste.
É pamaï lou comèrsan k’a soubre lu brè de croissan de la vèyà i be oblidza d'ou vèndre. Se guèrda bian d'ou sarvir a én pratic atitrô, lu rizarvan par lou pè couniu cao passa.
Ou nio k’ou tourna passa an lou four, anaé couéi éza é tra éficace mé alora couéra bian complica é lou Gustou s'i seryao éssedza. Ayao sin ou vouloir trèpa lou biè biôcou ma astuciou.
É vétïe coji lou manèdze fuguè dicoubar. Vou aé dï ke tsèc mati lou coumichionaïre patissaïre éra akeuyi par lou greu tsè de la maézou, loucune se sounèvao pè explicablamin Médor!
Akeu dzour tï, Médor lou tsè éra pè accouru eu davan dao drolou. For itouna de soun'absincia ilou éra in trèn d'ou imadzina malaote ou méme pire , mor can l'épiciaïre aparu soubre la puortà.
Son regar dibeubiyou faguè lou tour de la bouticà é se pouza soubre la corbèyà ou dispozèvao su croissan . Lou tsè sin doute fatigô par na partidà de tsèssà , durmèvao prigondamin soubre lou dou matela deu croissan de la vèyà.
Ilou s'éra ichubla dïin son som, l'animèl!
É lou Gustou agromandou agu biau fare : fute, fute ! é invèctiva keu bandi de Médor, lou mitrounetou fuguè dji dupe. Ayao compri ke lou matou ayao dïin lou paya sa coutchà coustumièrà don pèyèvao lou loyé in tenan in permaninsà lu croissan eu tsao! Én pao aplati mé a 40°, timpératiurà eurdinarà deu tsè bian pourtan!
Couma ou pinsé, lou patissaïretou tèn dji lou checré de lu croissan tsao de l'épicerio Briochin. Couéi aïtal ke poudin vou ou raconta sin riski: ou nio préscripchu!



Piata: faire des traces de pied (ex sur un carrelage mouillé); dedado: trace de doigt; découtir: sortir prestement du lit; dibeubiyou vient dibeubiya: enlever la chassie des yeux, on peut dire aussi dépikeurla; agromanda: faire vilain, être en colère.

Yves Fougerousse


Quelques conseils de prononciation ici

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commentaires

D
Merci pour cette recette du croissant chat !
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G
sympa d'agrémenter ces belles histoires de ton coup de pinceau !
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